6. L'impasse
…toutefois, il ne cessait de se dire en soupirant : «décidément, je ne peux vivre sans ailes ».
- « Sans elle » ? Mais il vit avec elle, chez elle. Il est bête ton oiseau-petit-garçon.
- Non, pas « sans elle », mais sans « ailes », a-i-l-e-s. Il ne pouvait plus voler puisque c’était désormais un petit garçon. Mais il regrettait sa forme antérieure et l’enivrante possibilité de voler au lieu de rester collé au sol. Pourtant elle lui redisait ce qu’elle lui avait dit bien des fois : « je ne peux pas vivre sans toi »
- Sans toit ? Mais elle en a un de toit sa maison .
- Non, sans « toi », t-o-i ; elle parle à l’oiseau-petit garçon qui de son côté, et à part lui, soupirait : « je ne peux vivre sans elle ».
- Écoute, si c’était un oiseau, alors il avait des ailes. C’est à devenir fou !
- Tu mélanges tout, tu es vraiment lourd et peu attentif. Là, l’oiseau est encore un petit garçon enfin ! et quand il dit « sans elle » il parle de la petite fille . Vu ? Il ne pouvait donc ni vivre sans ailes, ni sans elle.
- Pardon, mais avec tous ces homonymes, je m’y perds… Je t’assure que je suis ton histoire avec grand intérêt, mais ce style flashback ne facilite pas la compréhension.
- Sans doute, mais c’est aussi pour exercer ta souplesse intellectuelle… C’est formateur.
- Ah, encore l’ambition pédagogique !
- Je reprends… La petite fille comprit que voler était aussi important pour son compagnon que d’avoir un toit pour elle. Elle avait donc consenti à ce qu’il redevînt oiseau, comme avant sa transformation en petit garçon où l’on était déjà dans l’impasse de cet amour malheureux.
- Ça devient duraille. Tu crois que les enfants vont te comprendre ?
- J’en suis certaine ; ils ont beaucoup d’imagination et une grande capacité d’adaptation, même et surtout, à l’étrange et au bizarre.
- Ça c’est vrai. Moi, quand j’étais plus petit…
- Ne m’interromps pas, tu vas me faire perdre le fil de mes idées et il faut que je termine mon histoire.
- Pardon, continue.
- L’oiseau était donc redevenu oiseau…
- Tel qu’il était avant sa transformation en petit garçon et qu’il venait voir souvent la petite fille mais un véritable amour leur était impossible, lui un oiseau et elle une petite fille d’humains etc. etc. Encore le statu quo.
- Bravo, je vois que tu as compris. Mais ce n’est pas « encore le statu quo », puisque c’est la première fois que cela se produit ; on approche, en effet, du début de l’histoire.
- Ah, bon. Et que s’était-il passé avant ?
- Ah, ça t’intéresse je vois. Eh bien, la petite fille était rentrée chez elle.
- Mais, elle y était déjà chez elle !!!
- Si tu veux ; elle était chez elle parce qu’elle était revenue à la maison, ; mais il faut que je te parle de ce qui s’est passé avant qu’elle ne rentre chez elle.
- Où était-elle donc avant de rentrer chez elle ?
- Elle s’était installée dans le nid avec l’oiseau.
- La petite fille dans le nid ? Je ne vois pas comment elle pouvait y contenir.
- C’est qu’elle avait été transformée pour la première fois en oiseau et occupait le nid avec son compagnon… Elle vivait donc avec son amoureux dans le nid conjugal. Mais, comme on n’avait pas encore pensé à bâtir une maisonnette et qu’elle ne pouvait vivre sans toit, après avoir été re-transformée en petite fille, elle était rentrée chez elle, fort triste tout comme son amoureux.