5.la mission confiée (suite et fin)

Cette forme faisait irrésistiblement penser à un élégant chevalier de l’ancien temps, se rendant à une mission d’un pas décidé, alerte et léger. La fée y vit un symbole, ce langage des choses muettes. Elle comprit tout de suite le message du clémentinier comme une invite à agir selon ses pouvoirs. Car Mélusine, comme toutes les fées, avait des pouvoirs merveilleux. Ce qui n’était encore qu’un objet bizarre et éloquent était peut-être la préfiguration du héros qui allait restaurer l’ancien monde. Mais il fallait lui en donner les moyens et lui confier cette mission.
Voici ce que fit Mélusine : il fallait se garder de la forme humaine qui n’était plus reçue dans la nature à cause des terribles méfaits de l’homme ; pas de métamorphose donc ; elle conserva l’apparence de l’objet qui avait déjà la prestance d’un chevalier, le dota d’un bouclier et fixa sur son « bâton' » un fer de lance et un fer de hache ; le haut de la tête figurant assez bien un heaume. D’une certaine façon, malgré son apparence, il était humain.
Elle lui donna vie et l’adouba chevalier. Vu son origine végétale, il aurait nom chevalier Clément. Mais où est le cheval ? direz-vous. Je vous ai dit que les animaux hibernaient. Le chevalier accomplirait donc sa mission à pied, le titre devenant purement honorifique. En plus, Mélusine le rendit invulnérable, invincible et, pout faire bonne mesure, impropre à la consommation (on ne sait jamais…).
Évidemment, vu cette sienne origine végétale comme on a dit, le chevalier était au courant des malheurs de la terre et, tout en étant honoré de son adoubement – ce dont il remercia vivement la fée, il ignorait ce qu’elle voulait de lui, mais se déclara entièrement à son service. « Voilà, dit la fée. Tu vas accomplir une mission de la plus haute importance, puisqu’il s’y agit de faire revivre la terre , de la rendre de nouveau habitable et subvenante à la vie de tous les êtres et de la faire recouvrer sa beauté perdue. Tu vas partir en mission, la plus noble des missions. Je t’ai donné des armes, mais sache que tu n’auras en t’en servir qu’une fois, et ce sera lors de ta première rencontre. Elle te mettra aux prises avec un être monstrueux, à qui on doit tous nos malheurs et dont il faut impérativement débarrasser la terre à jamais. Pour les autres rencontres, il te faudra te servir uniquement de persuasion. Je t’ai parlé de la beauté à rétablir, il faudra aussi convertir les êtres que tu rencontreras à la bonté universelle qui pourra s’étendre, de façon contagieuse espérons-le, à toute la planète. De quelle façon? Je ne puis te le dire, mais je te fais confiance. Mais comment faire revivre la terre ? Je l’ignore, car ma vision ne va pas aussi loin. Tout ce que je sais, c’est qu’à la dernière étape de ta mission, tu rencontreras une dryade, la dernière en ce monde, retenue prisonnière dit-on, par un chêne vénérable, le dernier aussi de son espèce. Tu sais que les dryades et les arbres vivaient en étroite union, en symbiose comme on disait autrefois. Il y a là une dernière possibilité. Mais comment à partir de ces deux êtres uniques – comme ce fut le cas pour les humains selon une vieille légende - recouvrir la terre d’arbres et de dryades. Je ne le sais pas. A toi de voir. Va et bonne chance. »
Voyant le chevalier partir, Mélusine fut envahie par une crainte sourde qui lui fit verser des pleurs. La mission avait-elle quelque chance de réussir ?

Mais le chevalier était plein d’entrain et, au moment où il quittait allègrement la fée, un rayon de soleil l’illumina, ce qui était de bon augure. Mélusine en éprouva une joie secrète.

Voici donc le chevalier

lechevalier

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