De l'horrible danger de la confusion des idées
Il se trouve des gens, dans notre époque de repères chancelants et d’esprit critique pour le moins émoussé, pour revendiquer le « droit au blasphème » en l’associant à la laïcité et au nom de la liberté d’expression. On ne s’occupera pas des raisons politiques ou politiciennes, plus ou moins claires, qui motivent cette revendication, mais du sens de l’expression elle-même, notamment dans le contexte de la laïcité. Elle est dangereuse, inconséquente et dénuée de pertinence.
(i) dangereuse : dire que l’on a le droit de blasphémer, c’est vouloir choquer ceux pour qui le blasphème est condamnable et les provoquer : les réactions sont prévisibles et compréhensibles.
(ii) inconséquente : le droit au blasphème ne peut être revendiqué et exercé que par celui qui reconnaît une validité au blasphème : partisans et opposants se rejoignent en cet accord, tout comme l’iconoclaste et l’iconolâtre. Si on prétend montrer l’inanité du blasphème, il est inconséquent de réclamer le droit au blasphème. On ne peut éviter cette inconséquence qu’en tombant dans la provocation cf. (i)
(iii) le lien avec la laïcité manque totalement de pertinence. Dans un état laïque, la question du blasphème n’en est pas une et ne saurait faire l’objet de débat et donc de prises de position pour ou contre. J. L. Mélenchon est très clair là-dessus dans son blog http://www.jean-luc-melenchon.fr/arguments/en-republique-le-blaspheme-nexiste-pas/(titre « En République, le blasphème n’existe pas »)
(iv) en règle générale, dans une époque où pullulent les débats pour ou contre, il y aurait grand intérêt à évaluer la pertinence de la mise en débat de tel ou tel point. Il est des ailleurs hors de la prison dichotomique du pour et du contre sur une question sans consistance.
La question de la liberté d’expression doit également se délier du pathos et être soumise à lucidité et discernement.